C’est chez les Grecs qe le politéisme a trouvé sa forme la plus parfaite, mais le sanskrit, qi est la langue des aînés de notre race, a conservé la plus anciène expression du divin. Les Aryas de l’Inde invoqaient les Dévas, c’est-à-dire les Lumières, de la racine div, briller. Ce mot se retrouve dans le latin divus, qi a le sens de divin, et dans le grec
Les causes inconues qi sont à la fois les lois fisiqes du monde et les lois morales des sociétés, l’ome les conçoit à son image parce q’il trouve en lui le tipe d’une volonté libre, d’une loi qi se conaît èlemême. Ainsi, au lieu de chercher, come en Orient, un idéal divin dans la nature extérieure ou au-dessus d’èle, l’ome le trouve en luimême. Cet idéal, qi se révèle aux sens par la beauté, à l’esprit par la conscience du droit, il en revêt, come d’un manteau de lumière, les principes cachés de l’ordre universel, qi sont les Dieus, c’est ce qe la langue filosofiqe apèle antropomorfisme. Entre les Dieus et l’ome, la mort met un abîme qi semble infranchissable ; mais la religion grèqe comble cet abîme par le dogme rassurant de l’apotéose. La Grèce avait un sentiment trop profond de la dignité umaine pour ne pas déveloper cette noble croyance de l’immortalité de l’âme qi, par le culte des morts, ratache le présent et l’avenir au passé. Tandis qe les patriarches bibliqes s’endorment à côté de leurs pères, les héros grecs conservent au-delà du tombeau une vie indépendante. Protecteurs des familles, gardiens vigilants des cités, ils veillent sur leurs descendants, et le peuple qi les invoqe le matin des batailles onore leurs tombeaus come des temples et mèle leurs louanges à celles des Dieus.
On a cru longtemps qe les religions étaient l’œuvre des prêtres et qe la téocracie répondait à l’enfance des sociétés. C’est une double erreur qe l’étude scientifiqe des religions ne permet plus de soutenir. La famille est la molécule de toutes les sociétés umaines ; ce q’on trouve à l’origine de l’istoire des peuples, ce n’est pas la téocracie, c’est l’état patriarcal. Les religions ne sont pas plus l’œuvre qe les langues ne sont cèle des grammairiens. L’imaginacion populaire a créé la mitologie, langue naturèle des religions, come èle a créé la langue grammaticale. Spontanément, come l’oiseau chante, èle done aus croyances naissantes la forme poétiqe du simbole, come èle exprime par des images les idées générales qi s’éveillent dans l’esprit au contact des aparences. La tradicion maintient les formes du culte et les transmet d’une généracion à l’autre. La direxion du culte privé apartient au chef de la famille ; le dépôt des rites tradicionels du culte public est confié au sacerdoce qi partout, excepté dans la Grèce antiqe, forme un corps spécial dans l’État. Tantôt le sacerdoce se transmet de père en fils, sans certaines familles privilégiées qi forment une caste éréditaire, les Brahmanes dans l’Inde, les Mages en Perse, les Chaldéens à Babylone, les Lévites en Judée ; tantôt il se recrute par l’iniciacion individuele, come dans le Boudhisme et le Christianisme. Chez les Romains, la direxion du culte public apartenait aus chefs de famille ; en Grèce, cete fonxion était remplie par les magistrats en exercice. Il i avait des sacristains,
La mitologie est la langue naturèle des religions. Sous des formes poétiqes et plastiqes, èle personifie les Idées mères, ces principes latents et virtuels de toute existence, qi résident au sein de la Nuit primitive, mère des Dieus. La science, qi admet es molécules invisibles, mais étendues, qi personifie le caloriqe, qi croit aux deus fluides électriqes, qi expliqe la vie minérale par l’affinité, come si un mot expliqaut un fait, sourit dédaigneusement des Grecs, qi rêvaient une Dryade dans chacun des chênes de Dodone et un Nèréide dans chaqe flot de la mer
Tant qe les dogmes vivent dans la croyance des peuples, les Dieus ont une vie propre aussi personèle qe cèle de l’ome, qi ne peut les concevoir q’à son image puisqe l’ome est le tipe d’une force libre et d’une loi consciente. Leurs atributs sont multiples come nos facultés. Ainsi Zeus n’est pas seulement l’air vital qi nourit tout les êtres, le Dieu dont les mile imens se retrouvent dans les innombrables combinaisons de l’Oxigène, le roi de la foudre, qi descend en rosée bienfaisante dans le sein de la tère féconde ( conjugis in gremium lactae descendit ), il est aussi le principe de l’ordre universel, le vaiqeur des Titans, c’estàdire le modérateur des forces cosmiqes, et dans un sens plus exclusivement moral, le principe de la justice, base de toute société, source de toute vertu. La foi naïve des races jeunes se content du côté poétiqe des simboles. Qand le peuple d’Athènes allait en pélerinage au temple des Grandes Déesses d’Éleusis, les poètes lui racontaient l’enlèvement de Corè par Aïdes, la douleur de sa mêre et le retour de Corè à la lumière céleste. Cette légende sufisait au peuple, qi se retirait en remerciant la Mère bienfaisante à laqèle il devait le blé, nouricier de l’ome. Mais il i av ait aussi des esprits inqiets de la destinée humaine ; pour eus, Corè n’était pas seulement la végétacion, fille de la tère, qi meurt pendant l’hiver pour ressuciter au printemps ; c’était l’âme qi retrouve une vie nouvèle audelà du tombeau. Au dernier acte de l’iniciacion, l’iérofante montrait aux mistes un épi de blé coupé en silence, gage des promesses divines, simbole de renaissance et d’immortalité.
Qand les races vieillissent, l’esprit se sépare du corps, l’idée, pour se dégager, rejète l’image, la science brise l’urne du simbole où s’abreuvaient les peuples jeunes et forts. En qitant leur envelope de poésie, les vérités d’intuicion arrivent à la conscience d’èlesmêmes. Est-ce une mort, estce une résurexion ? Qand l’erméneutiqe stoïciène découvrait un sistème de fisiqe religieuse dans l’Ellènisme, qi était vivant à cette époqe, on lui objectait qe les prières dans les temples s’adressaient, non à des simboles, mais à des réalités ; la même objexion m’a été faite qand j’ai montré un psicologie religieuse dans la mitologie crétienne. On évite d’apliqer à une religion vivante le scalpel q’on emploie sans scrupule pour pour une religion morte ; ce n’est plus de l’anatomie, c’est de la vivisexion, et on craint d’entendre des plaintes, come une vois d’Amadryade s’exalant du chêne dont on soulève l’écorce. Rassurons-nous ; ce n’est pas blasfémer les Dieus qe de les élever dans la sfère idéale, au-dessus des formes fugitives, des incarnacions passagères de leur éternèle pensée. Les Dieus ne peuvent mourir, et qand on croit avoir scèlé la pière de leur sépulcre, il ressuscitent dans leur gloire, come aux jours où devant cete éblouissante lumière du